Le syndrome du banc de touche

DE Léa Girardet
MISE EN SCÈNE Julie Bertin

Il y a 20 ans Aimé Jacquet gagnait la coupe du monde et Léa rêvait de devenir comédienne.

Aujourd’hui, Aimé Jacquet est rentré dans l’histoire et Léa est restée sur la touche à l’image des footballeurs remplaçants. En proie à une crise de légitimité, la jeune femme décide de s’autotitulariser en suivant les pas de l’entraîneur de l’équipe de France.

DE ET AVEC Léa Girardet
MISE EN SCÈNE Julie Bertin
COLLABORATION ARTISTIQUE Gaia Singer
AVEC LA PARTICIPATION DE Robin Causse
CRÉATION SONORE Lucas Lelièvre
CRÉATION LUMIÈRE Thomas Costerg
COSTUMES Floriane Gaudin
VIDÉO Pierre Nouvel
REGARD CHORÉGRAPHIQUE Bastien Lefèvre, Jean-Marc Hoolbecq

PRODUCTION LE GRAND CHELEM, FAB, ACME
PARTENAIRES Théâtre Paris-Villette, Théâtre de Belleville, Festival Mises en capsules, So Foot, Tatane, Festival La lucarne.
REMERCIEMENTS Pierre Mankowski, Raymond Domenech, Vikash Dhorasoo, Lionel Charbonnier, Ghislaine Souëf et Aimé Jacquet

Le texte de la pièce est édité aux éditions Koinè.

LA BEAUTÉ DE L’ÉCHEC

Il s’agit ici de se demander quelle peut être la beauté de l’échec dans une société où la performance, la concurrence et la réussite nous sont données comme les seules lignes de conduite valable. Pourtant, il y a fort à parier que le succès se rencontre aussi en faisant l’expérience de l’échec…

« Tel joueur a raté sa carrière de peu ! Et rater sa carrière “de peu”, c’est déjà avoir du style. C’est même le comble du dandysme pour peu qu’on y mette un peu du sien. Il faut un minimum de style et de panache pour être un vrai loser. (..) La lose fait partie de la vie, elle est proche, omniprésente, tout simplement humaine. Le loser est mortel, comme nous. Alors magnifique ou pathétique il est notre frère, notre semblable et rate ce qu’on a soi-même raté »
“Pour l’amour de la lose” So Foot Chérif Ghemmour, Août 2009

Le syndrome du banc de touche est une déclaration d’amour à “la lose” et à tous ces moments de doutes qui nous poussent chaque jour à devenir la personne qu’on devrait être.

LE BANC DE TOUCHE

Ce projet part d’une expérience personnelle : le chômage qui a suivi mes années de formation en tant que comédienne. Très vite, un sentiment de mise à l’écart s’est installé dans mon quotidien, m’enfermant dans un cercle vicieux d’inactivité. J’ai fini par nommer ce sentiment en effectuant un parallèle avec les footballeurs remplaçants qui passent plus de temps à encourager leurs coéquipiers qu’à fouler la pelouse. Ce spectacle ne parle pas du métier de comédienne, c’est une porte d’entrée pour questionner le “banc de touche” au sens large du terme : cette exclusion sociale et ce sentiment d’illégitimité qui se mettent en place quand on ne travaille pas. J’ai découvert des parcours de grands sportifs dont le destin a  basculé du jour au lendemain et d’autres dont la carrière n’a jamais décollé. Le football a contaminé mon texte et l’a éloigné du côté autobiographique du seul
en scène. Ainsi, le sport et le théâtre sont devenus un seul combat et la thématique de mon projet m’est apparu : la persévérance face à l’échec.

LA FIGURE D’AIMÉ JACQUET

Pour notre héroïne, l’entraîneur de l’équipe de France Aimé Jacquet est un repère de réussite : une sorte de “self-made” stéphanois dont le parcours semé  d’embûches et de déceptions lui servent de référence pour s’extirper de situations compliquées voire humiliantes. Beaucoup de journalistes ont critiqué Aimé Jacquet, peu croyaient en lui et pourtant…C’est cette détermination, cette résolution à croire en soi qui inspire le personnage principal. Ainsi, en prenant comme référence l’entraîneur de l’équipe de France et les valeurs du sport qui lui sont chères (comme le collectif, l’entre-aide et la persévérance) l’héroïne parvient à mettre en place sa propre titularisation et à s’extirper du banc de touche.

LA PAROLE CONFISQUÉE

Au fil du texte, l’héroïne est confrontée à des personnages dominants comme l’agent, la conseillère, la psychanalyste… L’échange est déséquilibré et se transforme inévitablement en un rapport de force. En tant que comédienne, elle dépend nécessairement du désir des autres et ce systématisme la pousse dans une zone de passivité. Ce schéma s’applique également aux sportifs de haut niveau qui dépendent des sélectionneurs, des marques, des médias voire même des supporters.

L’indépendance et le positionnement personnel semblent compliqués dans ces deux domaines. Alors comment parvenir à retrouver une égalité dans ce rapport préétabli ? Comment réussir à inverser le schéma ? Et surtout, comment retrouver une parole qui jusqu’ici nous a été confisquée ? Bien souvent, la partition féminine au théâtre est cantonnée à la sphère de l’intime. Avec ce projet je souhaite portée une parole moins attendue, en utilisant un sujet à priori typiquement masculin : le football.

LA PAROLE INTIME DU SPORTIF

En parallèle du parcours de notre héroïne, nous découvrons des histoires de footballeurs remplaçants. Ce n’est pas la parole officielle des conférences de presse que nous entendons mais bien la parole intime des joueurs professionnels (leurs pensées sur le banc, leurs doutes lors d’une interview…) Cette parole, proche de la confession, permet une identification non pas au sportif mais à l’humain. Le documentaire “Substitute” de Fred Poulet et Vikash Dhorasoo lors de la coupe du monde 2006 a été une source d’inspiration. On y découvre un joueur blessé qui tente de comprendre et d’accepter son statut de remplaçant.

LE FOOTBALL FÉMININ

Que ce soit dans le domaine du football, de l’entreprise, du théâtre ou encore de la politique : la femme doit très souvent s’imposer dans un milieu majoritairement masculin. L’année 2019 sera marquée par la prochaine coupe du monde féminine de football. Il reste cependant un véritable travail de sensibilisation pour susciter l’intérêt du public. Le football féminin a toujours été relayé sur le banc de touche d’un point de vue médiatique. Aussi, nous nous arrêtons dans la pièce sur la figure de Gigi, première gardienne de but du Football Club Féminin de Reims. Là encore, à force de ténacité et de détermination, cette joueuse a réussi à s’imposer en tant que footballeuse, dans un milieu et à une époque où il était particulièrement difficile de percer. Force est de constater qu’il faudra encore de nombreux matchs pour que ces femmes soient reconnues à la hauteur de leur talent.

UNE MÉMOIRE COLLECTIVE

Au fil des entretiens réalisés, je me suis rendue compte de l’impact de la victoire de la France lors de la coupe du monde 1998 dans notre mémoire collective. Ce souvenir extrêmement joyeux a marqué la plupart des français (hommes et femmes confondus). Ce 12 juillet 1998, il n’était plus question de ballon, d’arbitre ou de banc de touche, il était question de bonheur et de rassemblement. Chacun sait où il se trouvait le soir de la victoire et les vingt années qui se sont écoulées n’ont rien enlevé à l’émotion et au panache du troisième but d’Emmanuel Petit !

Contact diffusion
Séverine André Liebaut
ACMÉ

CRÉATION le 5 septembre 2018 au Théâtre de Belleville (Paris)
TOURNÉE saisons 18-19, 19-20, 21-22, 22-23